La Culture : Kali Uchis réinvente la pop et le rap à la sauce latina
Pour débuter ses premières recommandations culture du week-end, Ambre Chalumeau met en lumière la sortie du nouvel album de la chanteuse Kali Uchis, intitulé « Orquideas ». La jeune star colombiano-américaine réinvente la pop et le rap à la sauce latina. Le tout dans un univers très « Euphoria ». Côté littérature ce vendredi, Ambre Chalumeau présente au fil de ses recommandations culture un livre intitulé « Van Dog », aux éditions Saltimbanque. L’histoire d’un chien peintre qui sort de chez lui pour peindre les scènes quotidiennes de la vie. Devant lui, une multitude d’animaux, de robots ou bien encore une souris en train de passer l’aspirateur. Avant que le lecteur ne découvre en fin d’ouvrage son tableau final. Pour terminer ses recommandations culture du week-end, Ambre Chalumeau se penche sur le film « Scrapper » sorti en salles cette semaine. Une comédie britannique qui met en lumière une petite fille de la banlieue anglaise vivant seule depuis la mort de sa mère. Et ce en faisant croire aux services sociaux qu’elle vit avec un oncle, qui n’existe finalement pas. Alors qu’elle passe ses journées à se la jouer « gangster » avec son meilleur ami, son père qu’elle ne connaît pas débarque finalement dans sa vie et va chambouler son monde.
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Kali Uchis, la diva des deux mondes
Elle nous souhaitait des roses dans son précédent album “Red Moon In Venus”, c’est finalement avec des orchidées qu’elle revient pour son 4e album studio, “Orquídeas”. Insaisissable et céleste, Kali Uchis réapparaît sur terre pour un hommage très personnel à la cultura latina.
Ce vendredi 12 janvier, Kali Uchis a dévoilé “Orquídeas” son deuxième projet interprété uniquement en espagnol. Un retour marqué notamment par l’annonce de sa grossesse dans le clip très intime de Tu Corazón Es Mío aux côtés de Don Toliver. Plus que jamais, la chanteuse américano-colombienne embrasse ses racines, dans un disque mêlant des sonorités latinos à sa touche musicale unique.
Passer des roses aux orchidées
Très attendu par les fans, “Orquídeas” succède au fascinant “Red Moon In Venus”, sorti il y a moins d’un an. À sa parution, ce dernier avait été auréolé d’éloges des plus dithyrambiques par la presse spécialisée, lui permettant de ses hisser aux pieds du podium du Billboard 200. Élément notable sans être déterminant, le projet va également bénéficier d’un coup de projecteurs avec la trend TikTok “Kali Uchis effect”, sur son morceau Moonlight. Cette dernière consistant à montrer son glow-up avant et après la découverte de la chanteuse.
A l’image de son single phare, “Red Moon In Venus” est une plongée dans un monde au parfum de paradis céleste. Une balade onirique et enivrante dans un jardin d’Eden, portée par la voix aérienne et séraphique de Kali Uchis. Les visuels qui accompagnent sa sortie viennent sublimer l’univers développé par l’artiste, en témoigne le très envoutant clip de I Wish You Roses.
Difficile de succéder à un tel bijou, mais avec “Orquídeas”, Kali parvient à propulser l’auditeur dans une toute nouvelle ambiance.
Kali Uchis, diva libérée
A chaque nouveau projet, Kali Uchis réussit la prouesse d’immerger l’auditeur et l’auditrice dans un univers inédit. On se souviendra par exemple du clip de Aqui Yo Mando sur le rétro-futuriste “Sin Miedo (del Ampor y Otros Demonios)” ou de l’esthétique pin-up 70s RnB décomplexée de son premier album “Isolation”.
En bientôt 10 ans de carrière, la diva a aboli les contours des genres en proposant tantôt du doo-wop, du RnB, du hip-hop, du reggaeton ou de l’alt-pop. Sa carrière se dessine au gré d’une anarchie paisible des styles. Sur chacun de ces terrains artistiques l’interprète de See You Again, parvient à s’entourer des meilleurs de la discipline. Subtilement, Kali Uchis réunit depuis ses débuts au sein de sa discographie des artistes épousant sa bi-culturalité, allant de Tyler The Creator, Jorja Smith, SZA, Amaarae, Don Toliver, Kaytranada, pour le côté anglophone à Buscabulla, Tainy, Jhayco, Jowel & Randy, Reykon pour la partie latino.
Il faut dire que depuis très jeune, celle qui s’appelait alors encore que Karly-Marina Loiza, baigne dans la musique des deux continents. Jeune adolescente, elle rejoint notamment l’orchestre de jazz de son lycée où elle pratique le saxophone. Son enfance est rythmée par les allers-retours ente la Colombie et les États-Unis, au cours desquels elle s’imprègne des sonorités et découvre les stars locales, comme Don Omar ou Ivy Queen.
A 17 ans à peine, mise à la porte par son père, elle se lance dans la réalisation de sa première mixtape. Dans son art, sa bi-culturalité devient sa force, sans pour autant la définir. Car Kali Uchis n’appartient véritablement à aucune case prédéfinie. Qualifiée “d’anarchiste des genres” par les Los Angeles Times Kaly vogue ainsi entre neo-soul et dream-pop sans se refuser l’idée d’explorer de nouveaux horizons.
“Orquídeas”, un deuxième hommage à la cultura
Avec “Orquídeas”, Kali Uchis a toutefois fait un parti-pris. Celui d’approfondir ses racines colombiennes et de proposer le deuxième opus 100% espagnol de sa carrière. Un choix séduisant mais risqué pour la chanteuse qui doit à nouveau relever le défi de conquérir deux marchés musicaux très différents**, et un public latino particulièrement critique à son égard en raison de ses origines américaines.
En 2020, la diva proposait “Sin Miedo (del Amor y Otros Demonios)”, dont le titre en référence à la nouvelle de Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature colombien, laissait à présager de nombreux hommages au continent latino-américain. Et à l’écoute, on ne s’y trompe pas puisque l’album s’ouvre avec la luna enamorada. Un titre inspiré de La Luna en Tu Mirada du groupe cubains Los Zafiros.
Mais “Orquídeas” pousse l’empreinte de la latinidad encore plus loin. Les trois premiers singles sortis en amont, en sont de parfaits porte-étendards, puisqu’ils empruntent chacun les codes d’un genre bien spécifique. Tout d’abord Munekita est un morceau puro-perreo emporté par les rythmiques dembow et la présence de pontes du style, El Alfa et JT. On notera également le sample du tube des années 2000 Papi Chulo de la reggaetonera Lorna, qui ravit les fans de l’âge d’or du début du 21e siècle.
De son côté, Labios Mordidos est un reggaeton ardent et sulfureux. Enflammé par la présence de la paisa Karol G, le morceau est un hymne générationnel pour les jeunes femmes décomplexées et en quête de liberté. À nouveau, la collaboration fonctionne, puisque les deux colombiennes avaient déjà collaboré sur l’album de la Paisa sur le titre Me Tengo Que Ir, présent sur “Mañana Sera Bonito (Bichota Season)”. Le single Labios mordidos avait d’ailleurs été teasé durant la performance de Karol G aux Billboard Music Awards 2023, recevant la ferveur des fans.
Enfin, Te Mata est peut-être le titre plus bouleversant. Ce boléro théâtral est rehaussé par une interprétation incarnée et une orchestration solennelle. Le clip qui l’accompagne est granuleux, et texturé. On y voit la chanteuse en cantatrice vengeresse et puissante, le tout dans une atmosphère almodovienne.
Le reste de la tracklist est tout aussi riche avec la présence de Rauw Alejandro pour compléter leur première collaboration sur No Hay Ley avec No Hay Ley 2, de Peso Pluma sur Igual Que Un Ángel et du compositeur prodige Tainy. “Orquídeas” se clôture en une fête somptueuse sur Dam beso // Múevete. Quoi de mieux qu’un merengue pour se dire au-revoir ?
Conquérir la scène européenne
Si Kali Uchis parvient à réconcilier les scènes latinos et américaines, sa conquête de la scène européenne, et surtout française, n’est pas encore à la hauteur de sa renommée mondiale. A l’exception Telepatia ses plus grands succès See You Again, Moonlight, She’s My Collar, ou After The Strom restent des morceaux en anglais.
En France par exemple, l’exportation des musiques latino-américaines, dans toute leur diversité, se heurte à des réticences et un certain scepticisme. En cause notamment, le fait que l’industrie, et les médias généralistes, continuent de les bouder et de les confondre, en les limitant souvent au reggaeton. Barrière de la langue, méconnaissance des codes et des différences entre les genres ou mépris culturel, les explications sont multiples et portent toutes en elles, probablement un fond de vérité.
Pourtant, il existe bel et bien un public en demande de musique latinos, en témoignent les succès foudroyants de “Motomamí” (Rosalía) et de “Un Verano Sin Tin” (Bad Bunny). Deux albums hybrides et proposant une riche variété de sonorités latinos, tout en étant 100% en espagnol. Également, la rapidité à laquelle Karol G a sold-out sa première date à Bercy, démontre bien l’engouement du public pour les sonorités du continent latino-américain.
Avec sa recette hybride, décomplexée et radicale, Kali Uchis a donc toutes les cartes en main pour séduire un nouveau public et ravir ses fans. “Orquídeas” se présente comme un album hommage et diversifié, plus que jamais dans l’ère dans l’ère du temps porté par une artiste-femme assumant ses désirs, son métissage et ses idées. Rien que pour cela, on a envie de dire : gracias Kaly.
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