Trois ans après le succès de “Mun”, qui l’avait installée comme étoile montante de la scène urbaine, où les femmes sont encore bien peu nombreuses, Mareva Rana, de son vrai nom, fait son retour avec “EGO”, un deuxième album dense.
A 28 ans, la jeune femme née en Suisse l’assure: cet opus est celui de la maturité. Ses deux précédents projets, “Karma” (2017) et “Mun” (2019) “étaient un peu des brouillons”, dit-elle dans un entretien à l’AFP.
“A l’époque, je savais pas trop qui j’étais et où je voulais aller. Je savais que je voulais faire de la musique mais je me posais pas trop de questions alors que dans +EGO+, il y a une vraie réflexion autour de ce que je vais donner aux gens et leur faire ressentir”, poursuit-elle.
“Ego”, c’est 14 titres dont du rap pur, des sons electro, des tonalités pop ainsi qu’une référence à “la dame en noir”, Barbara. Pas un album de rupture, il est plutôt celui de l’affirmation d’une identité musicale: multiple.
“Frustration”
“+Plutôt rappeuse ou chanteuse ?+ : j’avais envie de sortir de cette question qu’on me pose constamment pour défendre une intégrité musicale basée sur le fait qu’avant tout, je fais de la musique”, explique celle qui est passée par le conservatoire de Lyon avant d’être remarquée par le producteur de Diam’s et Kery James.
Des propos qu’elle doit sans cesse répéter elle qui a longtemps été cataloguée comme “rappeuse féministe” grâce des titres populaires comme “Sale chienne”, où elle dénonçait un milieu musical et plus largement même une société misogyne.
“On a essayé de me réduire au fait que j’étais féministe. Je ne crache pas dans la soupe, c’est vrai que cette étiquette m’a apporté de la lumière mais c’est devenu pesant dans la durée et aussi la source d’une grande frustration”, confie-t-elle.
Si “EGO” a été l’occasion de travailler avec de nouveaux artistes dont la chanteuse Louane, le rappeur Hatik ou encore le pianiste star du moment Sofiane Pamart (lui aussi à la lisière du classique et de la musique urbaine) Chilla est restée fidèle aux poids lourds de ses débuts comme Youssoupha, avec qui elle a co-écrit le titre “Enfoiré”, réflexion grinçante sur la célébrité, qui fait l’ouverture de l’album.
Si elle confie avoir été dans un état d’esprit assez sombre lors de l’écriture de l’album, Covid-19 oblige avec la fermeture des studios d’enregistrement et des salles de spectacle, elle n’a pas voulu d’un produit uniquement mélancolique ou déprimant.
Reste qu’à voix nue ou sur des mélodies plus rythmées, Chilla se livre sans tabou et avec la sensibilité qui la caractérise depuis ses débuts.
Que ce soit autour du deuil de son père, de son enfance difficile, “les fins de mois c’était la guerre”, comme elle le clame dans le titre “Mémo” ou de son rapport au corps et sa prise de poids dans “Zouh”, elle n’élude rien.
Encore moins sa quête de l’amour et ses rêves comme dans “Sonatine”, son duo onirique avec Sofiane Pamart.
“J’avais envie d’aller en profondeur sur ces sujets, qu’on comprenne mon histoire”, dit-elle. “J’ai grandi, je ne suis plus la fille des débuts mais l’authenticité du début, elle est encore là”.
© 2022 AFP
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